On imagine parfois qu’un voyage psychédélique est un moyen de se percher, de fuir la réalité matérielle et que le danger est de rester collé au plafond.

C’est tout l’inverse !

Quand il est bien préparé et guidé, il restructure, fait revenir dans la matière tout ce qui est a été mis en déni.

Bien des personnes qui viennent me voir ont pour intention première l’élévation spirituelle, l’éveil, la purification…

Au fil de la consultation on s’aperçoit bien souvent d’un besoin de fuir le quotidien et ses préoccupations terrestres, dimension à laquelle je ramène systématiquement les candidats au voyage. C’est dans mon devoir de les prévenir : s’ils cherchent à fuir vers le haut, la « médecine » va les emmener travailler le bas. C’est très fréquent chez nous, occidentaux. Encore plus ceux qui ont une quête « spirituelle » et qui utilisent déjà le haut pour anesthésier le bas, car les questions du bas sont douloureuses : ça se passe comment dans votre couple ? Avec vos enfants ? Votre famille ? Et les finances ? Votre sexualité ?

Les questions matérielles sont souvent au cœur de la tendance à la fuite.

Quand j’accompagne, nous allons d’abord visiter ces questions là, pour qu’elles puissent bouger naturellement suite au voyage. Je ne propose pas une solution de fuite, mais une plongée dans ce que les gens ont voulu fuir.

Une fois que ces choses là sont affrontées, il n’ y a plus besoin de fuir.

Pour moi la vraie médecine des truffes est celle qui aide les gens à habiter complètement leur corps, et les reconnecte à leurs tripes, leur désir, leur présent.

L’autre jour on m’a demandé si on pouvait devenir addict aux truffes, aux voyages. Pour moi c’est impossible, car ce n’est pas toujours une partie de plaisir !

Pour vous donner un exemple personnel, chaque voyage me met en face de ma mortalité, de la fugacité de la vie, de la préciosité de chaque instant. La vie et la mort dansent comme des serpents et tout peut s’arrêter à chaque instant. A chacune de mes visites dans ce monde là, il y a ce passage désagréable de conscience que tout va finir un jour, mais quand j’en reviens je me sens lavée, régénérée, les sens sont décrassés et je joue beaucoup plus avec mes gosses !

Parce que c’est ça qui reste à la fin. Les moments du quotidien que tu passes avec ceux que tu aimes.

Ça m’y ramène à chaque fois. Savourer les détails d’une journée. Se régaler. S’émerveiller d’un rien. Être au cœur de sa vie, vivant, présent.

Mais pas seulement. Plusieurs personnes m’ont dit que ça les avais aidés à s’occuper des trucs chiants qu’ils avaient remis à plus tard. Tout ce qui est mis sous le tapis va pouvoir être reniflé, traité, et digéré. Les petits riens, qui semblaient insignifiants, deviennent des chaînes quand ça a été mis en déni. Et ça peut devenir visible et prendre toute son importance pendant un voyage.

C’est un processus d’honnêteté avec soi même, finalement. Pas une fuite.

Pour moi, ça me met en face de mes responsabilités, et m’aide à clarifier des zones floues, quand il y a une peur derrière.

Si ça nous emmène vers un inconnu, c’est celui qui se cache derrière des couches de voiles qu’on a soi même mis avant. Conditionnements, peurs, hontes, conflit de loyautés… Tout le monde en a !

Il y a tant de choses qu’on pourrait être tenté de fuir ! Mais si on a le courage d’aller visiter notre humanité, si basse soit elle, alors le haut ne sera plus un échappatoire, mais un monde en soi.